4.4.07

N’ajustez pas vos écrans, c’est fini.

Comme vous le savez peut-être, je n’ai pas le câble. Mais avec une bonne paire d’oreilles de lapin, on arrive chez moi à capter très clairement 6 chaînes, dont Radio-Canada et CBC. Tout ce dont j’ai besoin, vraiment. Bah… disons que si j’avais une baguette satellite magique, je ferais apparaître sur mes ondes la délicieuse ARTV, mais sinon je suis pleinement satisfaite de ce que me procure le tube cathodique (je ne suis évidemment pas rendue au HD).

Avec ce choix limité de chaînes, on se retrouve automatiquement limité quant aux choix de séries à suivre. Et, afin de rester connectée à la culture québécoise (question de suivre les conversations pop-culturelles des amis et de la famille quand je retourne dans l’est), j’ai adopté plusieurs séries radio-canadiennes de la dernière décennie.

Un gars, une fille, La vie, la vie (la meilleure d’entre toutes, sans contredit), Rumeurs (joyeuse consolation quand La vie, la vie a pris fin), Les Bougon, sans oublier les émissions culturelles ou d’affaires publiques comme Tout le monde en parle (évidemment).

Parfois, je n’accroche pas à la première saison d’une série et puis, un jour, je me réveille et j’aime ça. Ça a été le cas de l’excellent Minuit, le soir, qui se terminait la semaine dernière, et de l’émission Les Invincibles, qui a pris fin lundi.


LES INVINCIBLES

J’avais attrapé Les Invincibles lors de sa première saison, intriguée par le travail du groupe de François Létourneau et de ses boys, que j’avais bien aimé dans Québec-Montréal et un peu moins dans Horloge biologique. Mais, en visionnant les premiers épisodes, j’avais tellement DÉTESTÉ ces quatre pauvres mecs que je n’avais pas pu continuer. Les personnages des invincibles ont exactement mon âge et j’avais l’impression de vivre un flashback surréaliste de mes années de Cégep et d’université, avec tous ces gars lâches et menteurs et fuyants et égocentriques qui peuplaient nos amourettes à mes amies et moi (pas étonnant que je sois partie dans l’Ouest, un peu beaucoup parce que je couvrais une peine d’amour ridicule pour un gars typiquement invincible qui avait été lâche, menteur, fuyant et égocentrique avec moi. J’ai d’ailleurs fait un petit calcul très scientifique pour aboutir à cette statistique très révélatrice : seulement 28% des hommes que j’ai fréquentés dans ma vie étaient des Québécois.)


Bref, ces loosers ne m’étaient pas du tout sympathiques et ce n’est que cette année que j’ai appris à AIMER LES HAÏR! Yé! Dans la dernière saison, les loosers se calaient dans leur médiocrité, ils se roulaient dans leur bassesse et ils se faisaient encore plus fourrer par les femmes! Quelle jouissance. Voilà, j’ai eu l’impression de me venger des petits machos poches de mon adolescence. Alors, oui, j’ai adoré tous les épisodes jusqu’à la finale, j’ai peu à peu eu de la compassion pour Steve, et puis pour l’autre, le Rocker au père encore plus looser que lui… Pour ce qui est de P-A, le personnage que je méprisais le plus, j’ai été agréablement surprise de voir qu’il avait trouvé un peu d’empathie en lui pour vouloir assister à la naissance de l’enfant d’une de ses « victimes » (mais j’aimerais bien voir l’éducation masculine qu’il donnerait à ce bébé garçon puisqu’on a maintenant vu de qui il a à retenir en matière de paternité). Et Carlos, pauvre petit Carlos, minus minable… qui se retrouve en enfer encore une fois avec Lyne la pas fine. Qui se ressemblent s’assemblent. Ben bon pour vous! Et ils vécurent malheureux et firent des enfants fuckés.



MINUIT, LE SOIR


Minuit, le soir… Ahhhhhhhhhhhhhhhhhhhh. De la BONNE télé.

Wow.

Un nom.

(Non, pas Claude Legault. Même si je trouve, moi aussi, qu’il est à croquer).

Un nom? PODZ.

Un des meilleurs réalisateurs du Québec. Un artiste qui sait faire taire sa caméra pour nous montrer les silences les plus évocateurs des personnages les plus attachants. Les écorchés vifs de Minuit, le soir n’avaient pas besoin de jacasser pour nous montrer leurs blessures d’enfance. Leurs peurs étaient tangibles et la caméra de Podz a su les capter. Une trame narrative qui saute et avance et recule et tournoie mais qui raconte efficacement. Un jeu d’acteurs retenu et nuancé qui nous permet de plonger dans leurs yeux, jusqu’au fond d’une intériorité brute, encore saignante. On ne peut pas s’empêcher de s’attacher à tous ses personnages. On veut qu’ils soient heureux, on veut que Fanny se laisse aller à aimer Marc, on veut que le Vieux soit notre voisin d’à côté, on veut que le Gros se fasse une blonde. On veut tous les prendre dans nos bras pour leur dire que tout va bien aller.

Et même une fois que le corps du P’tit gît sur le sol, ensanglanté, même en regardant le générique se dérouler sous nos yeux, on se demande encore qui va prendre soin de Fanny, qui va consoler Louis et Anne-Julie, qu’est-ce qui va arriver au Sass, qui va les adopter de nouveau, comme nous, les téléspectateurs, l’avons fait depuis trois ans. On s’inquiète, comme si ces personnages-là, au-delà de la fiction, étaient vraiment devenus nos amis.

Ça, c’est la preuve que le Québec fait de la maudite bonne télé.

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